Petite ville et démocratie participative, une combinaison gagnante pour assurer l’avenir
13 mars 2025 • By Amina-MathildeLe cas d’Oloron Sainte-Marie (Pyrénées-Atlantiques, 64)
Interview croisée élue, citoyennes
Oloron Sainte-Marie est une ville des Pyrénées-Atlantiques située dans le Béarn au pied des Pyrénées, à 33 km de Pau et proche de l’Espagne. Elle compte environ 10 500 habitants et possède un riche patrimoine historique ainsi qu’un tissu économique diversifié, incluant des entreprises comme Lindt et Safran Landing Systems. La ville dispose de plusieurs établissements scolaires et d’une gare desservie par le TER.
Depuis 2020, la municipalité de sensibilité de Gauche mise sur la participation citoyenne pour dynamiser la commune. Un budget participatif annuel de 50 000 euros et le projet de réhabilitation de La Friche conçu en concertation avec les habitants, sont deux initiatives phares. Ce dernier projet a été récompensé à l’Assemblée nationale en 2023, événement organisé par le think tank Décider Ensemble et La Gazette des Communes
Nous nous en sommes entretenus avec Marie-Lyse Bistué, première adjointe au maire en charge de la démocratie participative et deux habitantes impliquées, Bénédicte Loustaunau et Danièle Chrestia.

Vue d’Oloron Sainte-Marie


L’élue Marie-Lyse Bistué (centre) entourée de Bénédicte Loustaunau (gauche) et Danièle Chrestia (droite)
CT : Qu’est-ce qui a donné lieu à la mise en place du premier budget participatif à Oloron ?
M-L. B : Dans notre programme électoral en 2020, nous nous étions engagés à donner davantage la parole aux citoyens et à les rendre acteurs de leur vie locale, en mettant chaque année une ligne budgétaire à leur disposition pour qu’ils décident d’un projet d’intérêt général, individuellement ou en groupe. Même un enfant, seul, à partir de 14ans, ou accompagné d’un adulte à partir de 6 ans, peut y prendre part.
CT : Avez-vous été inspirés par des projets similaires ?
M-L. B : La démocratie participative nous apparaissait comme une évidence et nous avons regardé ce qui se faisait dans des villes de notre taille mais nous sommes partis d’une page blanche.
CT : Quels étaient les buts recherchés ?
M. L. B : Grâce au budget participatif et plus largement les initiatives de participation citoyenne nous avons voulu en premier lieu créer du lien entre les citoyens, les élus et les services municipaux, mais surtout favoriser les rencontres entre habitants qui souvent ne se connaissent pas forcément.
C’est ainsi que lorsque deux projets similaires sont proposés au budget participatif, nous encourageons les porteurs à se parler et à fusionner tant que faire se peut leurs idées pour faire en sorte qu’un seul projet puisse répondre aux attentes des uns et des autres.
Ce dispositif a aussi une dimension pédagogique car il permet aux habitants de comprendre les contraintes habituelles auxquelles la municipalité est confrontée. Ils réalisent à cette occasion les impératifs de temps, de budget et de réglementation, comme les marchés publics ou les validations d’architectes.
Certains projets non retenus peuvent néanmoins être réalisés s’ils retiennent l’attention des élus, comme l’installation de boîtes aux lettres à hauteur de véhicules pour faciliter l’accès aux personnes à mobilité réduite.

CT : Quel est l’outil utilisé pour le budget participatif et s’il s’agit s’une application « du commerce », comment l’avez-vous sélectionnée ?
M-L. B : Le dispositif est simple et n’a pas nécessité de développement complexe. C’est le service communication de la mairie qui y a travaillé et nous l’améliorons à l’usage.
CT : Comment le processus est-il expliqué aux habitants ?
M-L. B : La première année on avait fait une petite vidéo explicative qui passait sur les réseaux, qui est encore sur le site de la ville. On avait fait un point presse et chaque année on réexplique le règlement et les dates du budget participatif , on distribue des flyers pour le rappeler et il est également téléchargeable.
Je précise que les projets doivent être des projets d’investissement et non des budgets de fonctionnement et doivent constituer une dépense unique et non récurrente.
Les initiatives ponctuelles autour de projets de vie dirons-nous peuvent être discutés avec les autres services de la mairie, comme le service jeunesse, le service culture ou le CCAS.
CT : Quelle est la chronologie de sélection des projets dans le cadre du budget participatif ?
M. L. B : Les projets du budget participatif sont déposés par les habitants en octobre et novembre, accompagnés d’un résumé, d’objectifs et d’un chiffrage qui doit respecter la ligne budgétaire. Ils peuvent être soumis en ligne ou en mairie format papier.
De décembre à février, une commission étudie leur faisabilité technique, juridique et financière. Les citoyens peuvent solliciter les services municipaux pour des précisions et organiser des réunions si nécessaire.
En parallèle, le service communication diffuse les informations et prépare les bulletins de vote.
Du 3 au 30 mars, les citoyens votent en ligne ou en mairie, avec une seule participation autorisée par personne.
Pour 2025, exceptionnellement, le budget a été porté à 60 000 euros, en raison du report de 10 000 euros non utilisés l’an dernier. Il faut savoir que chaque projet retenu ne doit pas dépasser 40 000 euros, ce qui permet d’en financer plusieurs et d’encourager les porteurs de projets plus modestes, tout aussi intéressants pour les habitants.
Le dépouillement se fera le 31 mars sous contrôle d’huissier pour éliminer les doublons ou les votes non valides.
Et les résultats seront annoncés en avril lors du conseil municipal, le jour du vote du budget.
CT : Pouvez-vous nous dire plus sur cette commission qui analyse les projets ?
M-L. B : Font partie de cette commission des élus de la majorité et de l’opposition et des techniciens de la ville qui sont là pour nous rappeler la règle si jamais quelque chose nous échappait. Ensemble, nous nous assurons que les projets sélectionnés pour le vote cochent bien toutes les cases du règlement.
CT : Quelle proportion d’habitants prend part au budget participatif ?
M-L B : Nous en sommes à la 5ème édition du budget participatif et sur les 4 éditions précédentes, un total de 3000 habitants a pris part au vote pour un total de 23 projets soumis au vote. 9 de ces 23 projets ont été choisis par la population, parmi lesquels 8 ont été inaugurés et le dernier projet, le lauréat 2024, en cours de réflexion/réalisation.
CT : Comment avez-vous communiqué sur le premier budget participatif ?
M. L. B : La communication sur le premier budget participatif s’est faite via la presse, les réseaux sociaux (Facebook, Instagram) et une courte vidéo largement diffusée. Les informations ont été relayées dans notre newsletter numérique, le magazine papier Inf’Oloron et sur le site de la ville. Les comités de quartier ont également joué un rôle en relayant l’information et en étant à l’écoute des citoyens.
B. L : Cette initiative municipale a renforcé notre engagement et notre motivation à améliorer le cadre de vie local. Bien que bénévoles et sans expérience particulière pour la plupart, nous apprenons beaucoup et davantage d’habitants s’impliquent chaque année.
CT : Quelle est la sociologie de la ville et des habitants qui participent ?
M. L. B : La population d’Oloron est aujourd’hui moins ouvrière qu’avant du fait qu’une partie du tissu industriel a disparu, alors elle se répartit entre les employés des trois entreprises, Lindt, Messier Safran, les bérets Laulhère, le personnel de l’hôpital, les employés administratifs dont ceux de la mairie, des enseignants, quelques professions libérales, des artisans et quelques agriculteurs. Une frange de la population, des personnes éloignées de l’emploi et des retraités avec de petites pensions reste plus en marge.
M. L. B : La sociologie des participants au budget participatif n’est pas précisément définie car nous demandons peu d’informations personnelles dans le processus, mais toutes les tranches d’âge et les deux genres sont représentés, avec une sur-représentation logique des retraités en raison de leur disponibilité.
B. L : Je précise que chaque année, de nouveaux habitants, notamment des néo-Oloronais, rejoignent nos comités de quartier, ce qui les aide à s’intégrer plus vite.
CT : Côté habitants, y a-t-il eu un comité représentatif qui s’est formé autour de cette initiative ?
M-L. B : Les projets proposés pour le budget participatif ne sont pas toujours initiés par les comités de quartier. Cela peut être des personnes seules qui peuvent tout à fait se mettre directement en rapport avec les services et les élus de la ville. Nous souhaitons que l’accès soit le plus direct et le moins excluant possible.
CT : Quelles évolutions avez-vous remarquées depuis la première édition du budget participatif ?
M. L. B : Lors de la première édition en 2020, 42 projets ont été déposés, mais seuls 9 étaient conformes, et un projet unique a absorbé tout le budget. L’année suivante, seulement 8 « grands » projets ont été proposés. Alors on a décidé d’instaurer un plafond de 40 000 euros par projet, ce qui laisse 10 000 euros pour des idées au budget plus modeste. Depuis, entre 15 et 20 projets sont soumis chaque année. Le taux de participation au vote oscille entre 900 et 1100 votants, soit environ 12,3 % des habitants en âge de voter.
B. L : En tant que porteurs de projet, on a compris l’importance de communiquer et de faire campagne pour obtenir des votes. Cette année, nous, on distribue des flyers, on fait du porte-à-porte et on compte intervenir sur les radios locales comme Radio Oloron et Ici (ex-France Bleu). En plus de nous assurer plus de votes, cela renforce l’échange entre habitants et l’engagement citoyen.
CT : Pouvez-vous nous parler du projet d’aménagement de la Friche, mené en concertation avec les citoyens ?
M. L. B : Le projet de la Friche, qui je le précise, ne fait pas partie de la démarche de budget participatif, est mené en concertation citoyenne depuis 2022. Il concerne un ancien garage devenu magasin de meubles, long de 70 mètres et situé en plein centre-ville et que la mairie a racheté après sa fermeture. Son aménagement vise à en faire un tiers-lieu polyvalent, à désenclaver deux quartiers proches mais aujourd’hui isolés l’un de l’autre, tout en favorisant les mobilités douces.
Une enquête papier et numérique a recueilli plus de 1000 réponses, bien au-delà de nos attentes, qui ont révélé les envies des habitants, notamment pouvoir y écouter de la musique, se former, y travailler, s’y rencontrer et y manger, notamment le dimanche où beaucoup de commerces sont fermés.
Comme la municipalité ne pouvait pas financer seule ce projet, nous avons sollicité l’État, la région, le département et la communauté de communes dans le cadre du programme « Petites villes de demain » .
Des groupes de réflexion ont ensuite approfondi ces besoins, notamment sur la restauration et son accessibilité. Un été d’expérimentation a permis d’installer sur le lieu une guinguette avec un food truck, des émissions radio, du skate et du street art. Cela nous a permis d’évaluer ce qui fonctionnait ou posait problème, en particulier avec le voisinage, et d’affiner le projet final.
CT : A ce stade-là, les bâtiments avaient-ils déjà commencé à être rénovés ?
M. L. B : Non, pas du tout. Le cabinet d’architecture avait été retenu, mais avant de dessiner quoi que ce soit, il fallait attendre la fin de cette enquête pour savoir ce qu’on allait mettre dans cet espace.

Projet de La Friche
CT : Comment avez-vous déterminé ce qui allait finalement être abrité sur la Friche ?
M. L. B : Pour répondre aux attentes variées des habitants, on a pensé que la Friche devait être un espace modulable pour pouvoir accueillir des concerts, de petits marchés, des lotos, de petites kermesses et d’autres activités. Le monde économique et les organismes de formation ont aussi été consultés et ont souhaité pouvoir s’y réunir ponctuellement et y organiser des formations pour éviter aux habitants de se déplacer à Pau. La Friche abritera aussi les locaux de Radio Oloron.
Après avoir recueilli toutes les demandes, les services techniques et les architectes ont travaillé sur le projet. Puis, une grande maquette en bois a ensuite été réalisée et présentée dans les écoles, les comités de quartier et lors d’événements divers.
Alors, avant même le début des travaux, les Oloronais ont su précisément ce qui allait être aménagé dans la Friche pour un budget total d’un peu plus de 3 millions d’euros.
CT : Comment avez-vous décidé qui pourrait s’installer sur la Friche ?
M. L. B : Deux commissions extra-municipales ont été créées pour cela, composées de 7 élus et 7 citoyens, accompagnés par des techniciens et un cabinet d’intelligence collective.
D. C : Une commission a sélectionné le restaurateur permanent et les kiosques, tandis que l’autre a défini le mode de gouvernance. De nombreuses réunions ont eu lieu, toujours dans un esprit d’écoute et de consensus je dois dire. Un comité éthique veillera au respect de l’esprit initial du projet.
Pour sortir des situations potentiellement bloquantes, l’association qui gérera la Friche prendra d’ailleurs ses décisions non pas à la majorité, mais par consentement.
CT : Pouvez-vous expliciter ce qu’est le consentement ?
D. C : Cela veut dire que quand on n’est pas d’accord, on dit pourquoi et on se doit de proposer une autre solution. On a quand même prévu une sortie dans le cas d’absence de consensus ; la décision se prendra alors à la majorité des deux tiers.
CT : L’association qui va gérer la Friche n’est donc pas encore créée ?
M. L. B : L’association chargée de gérer la Friche n’est pas encore créée, mais sa structure est en préparation. Elle sera composée de plusieurs collèges : citoyens, occupants permanents, élus, jeunes et associations existantes. Chaque collège aura quatre représentants qui siégeront au conseil d’administration. Ce sera l’association, et non la municipalité, qui gérera le budget annuel de la Friche.
CT : Actuellement, vous en êtes où dans le projet ?
M. L. B : La construction de la Friche est bien avancée, avec une inauguration prévue en octobre 2025. Actuellement, la recherche d’un animateur chargé de coordonner les activités est en cours, avec 70 candidatures reçues de toute la France et un processus de sélection en plusieurs étapes. Le recrutement se fait en concertation avec les membres de la commission extra-municipale, et la personne retenue commencera en mars pour se familiariser avec le territoire. Les premiers temps, elle bénéficiera du soutien des services culture et jeunesse de la mairie.
Une attention particulière a été portée à éviter toute concurrence avec les activités existantes à Oloron. Par exemple, la Friche offrira une scène aux artistes amateurs qui pour beaucoup n’ont pas la possibilité de se produire à l’Espace Jéliote, la salle de spectacle existante, de dimension nationale. Et l’idée d’un espace de coworking a été abandonnée puisqu’un lieu dédié existe déjà en centre-ville.
CT : Le projet de la Friche a reçu une distinction de participation citoyenne. Pouvez-vous nous en dire plus ?
M.L B : En effet, en 2023, le projet de la Friche d’Oloron Sainte-Marie a obtenu 3 étoiles, la plus haute distinction en Nouvelle-Aquitaine, dans le cadre des 8ème Trophées de la participation & de la concertation organisés par le think tank Décider Ensemble et La Gazette des Communes. Nous avons été accueillis à l’Assemblée Nationale pour recevoir cette distinction qui a récompensé, je cite, « une très belle co-construction de tiers-lieu, avec une méthode innovante et investie. Le sujet a mobilisé un grand nombre d’actrices et acteurs , ce qui souligne la validité et l’importance de la démarche pour la population ».
CT : C’est un lieu qui veut aussi s’inscrire dans le paysage architectural ?
M.L. B : L’architecte qui planifie le projet de la Friche est Anna Chavepayre, du collectif Encore basé en Béarn. Elle est franco-suédoise et est la deuxième femme à avoir reçu le prix suédois d’architecture Kasper Salin, en 2018. Elle est reconnue pour ses positions avant-gardistes en matière d’architecture et d’aménagement du territoire, en milieu rural en particulier. La particularité de son travail est de favoriser une symbiose naturelle entre le paysage et le bâtiment.
J’ajoute par ailleurs que nous aurons le plaisir d’accueillir à Oloron du 9 au 11 octobre 2025 la seconde biennale d’Architectes en Mouvement de Nouvelle-Aquitaine, après Limoges en 2023.
CT : Pensez-vous que ces initiatives ont fait évoluer les relations municipalité – citoyens ?
D. C : Pour ma part, je considère que la participation aux initiatives de démocratie participative a renforcé le lien des citoyens avec notre ville et je ressens cela personnellement. Les échanges entre habitants sont favorisés, ainsi qu’avec les élus et les techniciens, en fait cela a donné lieu à des connexions inédites. Pouvoir décider de l’avenir de la Friche ou du recrutement de l’animateur me donne un sentiment fort de responsabilité collective.
CT : Quels sont les freins que vous voyez à plus de participation citoyenne ?
M. L. B : La participation citoyenne demande un engagement rigoureux et chronophage, ce qui peut être un frein pour beaucoup de personnes. Les bénévoles doivent participer à des réunions, souvent rédiger, respecter un cadre administratif et prendre en compte divers avis, ce qui peut être frustrant avant d’obtenir des résultats concrets.
D. C : La clarté du « mandat des citoyens » est essentielle pour éviter toute confusion. Les citoyens doivent être conscients dès le départ de l’ampleur de l’investissement qui est attendu d’eux. Au début, certains peuvent penser que la concertation est une simple communication municipale et qu’il n’y a pas réellement de prise en compte des expressions citoyennes. Mais en s’impliquant, ils réalisent que la co-construction implique de vraies responsabilités autour de la réalisation du projet souhaité par les habitants et de la gestion de son budget.
CT : Est-ce que vous avez rencontré des résistances ou de la critique à propos de ce projet ?
M. L. B : Certains préféraient d’autres options d’aménagement comme une galerie marchande par exemple, tandis que d’autres craignent de mauvaises fréquentations du lieu. Mais le fait que le projet soit conçu avec les habitants aide quand même à apaiser les oppositions.
CT : Pensez-vous qu’il y ait un risque pour le projet si, par exemple, la couleur politique de la prochaine municipalité change ?
M. L. B : Le projet de la Friche va être géré par une association à plusieurs collèges, ce qui lui offre une certaine sécurité, avec un comité éthique pour garantir son indépendance. Même si la situation évolue dans le futur, les collectifs citoyens pourront toujours agir dans le respect de la concertation citoyenne. L’indépendance financière de l’association contribuera à réduire les risques, contrairement à un financement direct par la municipalité. D’ailleurs, la mairie n’a qu’une seule voix au sein de l’association. C’est pourquoi la bonne gestion de la Friche sera essentielle.
CT : Justement, d’où viendra le budget de fonctionnement de la Friche ?
M. L. B : Le budget de fonctionnement de la Friche sera en partie financé par une subvention municipale pour les toutes premières années. Et l’animateur aura pour mission de rechercher des fonds. Des revenus proviendront aussi des locations de restaurants, kiosques et salles. La salle de concert se financera par la vente de billets. L’objectif global est d’assurer l’indépendance financière.
Par ailleurs, le bâtiment est conçu de manière écologique pour être le plus sobre possible, avec son réseau de production de chaleur, des panneaux solaires et un système de récupération des eaux.
CT : D’après votre expérience à Oloron, quelles sont les leçons à retenir en matière de démocratie participative ?
M. L. B : Je dirais que la confiance se gagne d’abord en ayant une communication claire et ouverte, et en permettant à chacun de s’exprimer, même en cas de désaccord.
Puis il est important d’oser, d’accepter de se tromper parfois et de ne pas décider trop vite, en revenant en arrière si nécessaire, d’accepter un accompagnement temporaire comme nous l’avons fait avec le cabinet en intelligence collective pour la Friche, afin de bien respecter les cadres définis.
Il faut aussi être conscient qu’on ne peut pas satisfaire tout le monde et pouvoir expliquer les arbitrages qui sont faits en matière de projets et de décisions budgétaires.
CT : Côté citoyens, pouvez-vous nous parler d’une réunion de comité de quartier typique ?
B. L : Oloron compte neuf comités de quartier, dont celui dont je fais partie, l’un des plus dynamiques. Son comité se réunit tous les deux mois pour discuter des actualités du quartier, des problématiques comme la vitesse ou le stationnement, et pour faire remonter les retours variés des habitants à la mairie. Les réunions sont ouvertes à tous, que ce soit pour écouter ou proposer des idées. La fois d’après, on partage et commente le retour de la mairie avec les habitants. Lors de la dernière réunion, nous étions une quarantaine. En plus du budget participatif auquel on prend part pour la seconde fois, notre comité mène d’autres projets d’animation dans un espace de vie sociale et un théâtre de verdure que la mairie nous aide à faire vivre.
CT : Est-ce que les élèves et étudiants des écoles d’Oloron sont sensibilisés à la participation citoyenne ?
M. L. B : Les jeunes d’Oloron connaissent la participation citoyenne mais s’impliquent peu dans les comités de quartier. Cependant, certains participent au budget participatif, comme un petit groupe d’élèves du lycée Guynemer qui ont fini après deux tentatives par obtenir le city-stade qu’ils demandaient.
Les jeunes s’engagent surtout dans les nombreuses associations locales. Il y en a 250 en tout. Elles aussi sont soutenues financièrement par la mairie avec un budget d’un million d’euros par an.
CT : Si l’on devait transposer ces initiatives au niveau régional, voire national, qu’est-ce qui serait réalistiquement réalisable selon vous ?
M.L. B : C’est forcément plus compliqué lorsqu’on s’éloigne de la collectivité, parce que le concret et la proximité sont des éléments déterminants. Que ce soit côté élus comme côté citoyens, on rencontre les gens, on est amenés à les revoir, alors on ne souhaite pas les décevoir quand on s’engage dans des projets qui ont reçu une adhésion collective. Et on ne peut pas non plus se défausser, alors qu’à des niveaux plus larges, on peut toujours dire que tel ministère, telle administration ou telle contrainte nous empêchent de réaliser un projet attendu.
Je suis aussi conseillère départementale et on a lancé des budgets participatifs au niveau du département mais nous n’avons pas eu la même mobilisation ni le même engouement qu’au niveau de la ville.
CT : En conclusion, si vous deviez résumer en une phrase votre expérience de la participation citoyenne dans votre ville, vous diriez…
M. L. B : Nous vous proposons une phrase commune, plutôt un petit paragraphe, de la part de nous trois. Nous vous en disons chacune une partie.
D. C : La participation citoyenne est une expérience surprenante, enrichissante, utile et très prenante.
B. L : C’est une grande chance pour les citoyens de pouvoir s’exprimer et d’être écoutés pour agir pour leur ville.
M. L. B : Et c’est motivant pour les élus de co-construire des projets structurants, gage de la réussite et de l’appropriation d’un lieu.